La démocratie dominicaine mérite quelques explications en ce qui concerne son fonctionnement interne. En effet, ce fonctionnement démocratique est finalement très moderne pour une institution vieille de huit cents ans.

Chacun est élu

Dans l’Ordre des prêcheurs, les charges de gouvernement sont toujours électives. Une élection se déroule selon un certain nombre de principes façonnés par une expérience de près de huit siècles. Dans la démocratie dominicaine, personne ne se déclare candidat, et personne ne peut validement voter pour soi-même.

Alors, comment se déroule une élection ? Avant l’élection, celui qui exerçait la charge précédemment fait un rapport sur son mandat. Ce rapport est discuté par l’assemblée. Ensuite, on procède au tractatus. Ce n’est pas un débat sur l’élection, mais une manière d’écouter ce que chaque électeur peut avoir à dire sur des frères dont les noms sont proposés à l’élection. Un tractatus est toujours un moment grave et important, durant lequel chacun cherche à dire ce qu’il pense du frère pour la charge que l’on va pourvoir. Il s’agit de donner un avis sur l’adéquation de la personnalité du frère à la charge. Et non pas d’en profiter pour dire tout ce que l’on pense de lui, en bien ou en mal !

Au chapitre provincial, la première journée de travail de l’assemblée est entièrement consacrée à ces préparatifs. On y écoute le rapport du provincial sortant et on y procède au tractatus sur l’élection. Le lendemain matin est célébrée la messe du Saint Esprit. Puis vient le moment du vote. Une fois le vote terminé, le procès-verbal de l’élection est envoyé au Maître de l’Ordre. Celui-ci peut alors confirmer ou casser l’élection. Dans l’attente de sa réponse, qui aujourd’hui arrive très rapidement grâce aux nouvelles technologies, l’élu préside l’assemblée capitulaire.

Qu’est-ce que le chapitre provincial ?

Le chapitre provincial est célébré tous les quatre ans. C’est une assemblée qui rassemble les prieurs des couvents et des délégués élus par les frères. Sont également présents le prieur provincial sortant, les prieurs régionaux et vicaires provinciaux.

Le chapitre comporte, selon l’usage, deux temps bien différents. Premièrement, l’assemblée capitulaire dure une semaine. Elle est consacrée à l’élection du prieur provincial et des définiteurs. On y procède également à des discussions aboutissant parfois à des votes, parfois à de simples explorations des enjeux d’une question.

Puis, durant les trois semaines suivantes, le définitoire siège à Paris. Il est composé du prieur provincial et des six définiteurs. Ce définitoire a la charge de prendre les décisions concrètes, de mettre en œuvre les décisions déjà votées par l’assemblée et de procéder aux nominations des officiers provinciaux. Tous les frères qui ont une charge au service de la province, dans le gouvernement provincial ou dans la formation, « tombent » à chaque chapitre. Cela veut dire que toutes les charges sont donc à pourvoir à nouveau.

Enfin, après ce mois d’intenses discussions, base de la démocratie dominicaine, le définitoire rédige les actes du chapitre, qui sont envoyés au Maître de l’Ordre. Le Maître de l’Ordre donne son approbation et elle seule leur donne leur valeur. À l’issue de tout ce processus, le prieur provincial gouverne la province durant quatre ans. Il est aidé dans sa fonction par un assistant et un conseil provincial composé des six définiteurs, du prieur provincial sortant, du régent des études et de deux conseillers élus par le chapitre.

Le chapitre général : primordial dans la démocratie dominicaine

C’est la réunion des frères représentant les provinces de l’Ordre, pour traiter et décider de ce qui concerne le bien de tout l’Ordre. Il se réunit tous les trois ans.

Quand il s’agit d’élire en plus le Maître de l’Ordre, tous les neuf ans, on parle alors d’un chapitre général électif. Le chapitre général est alors plus nombreux, car il rassemble les provinciaux et des définiteurs élus par les chapitres provinciaux.

Un chapitre général électif est primordial dans la démocratie dominicaine. Sa tâche est double. A la fois élire le Maître de l’Ordre, et en même prendre les décisions nécessaires à la vie de l’Ordre. Les Actes publiés par le chapitre sont un lieu de réflexion pour les frères durant les trois années à venir. Ils constituent également une ligne directrice pour le gouvernement du Maître de l’Ordre.

Enfin, notre Ordre a cette particularité unique dans l’Église que, depuis sa fondation, il accorde un pouvoir législatif aux chapitres généraux. C’est une des particularités de la démocratie dominicaine. Les chapitres généraux ont donc la possibilité de faire évoluer les Constitutions de l’Ordre, afin de les adapter aux évolutions du monde. L’Ordre dominicain n’a donc pas de « règles de saint Dominique » auxquelles on chercherait régulièrement à revenir. Au contraire, les adaptations portent souvent sur des points de détail, parfois un peu techniques, mais elles permettent à l’Ordre d’avoir une législation interne qui corresponde aux besoins réels des frères dans une époque donnée.

Petit lexique de la démocratie dominicaine

Prieur provincial

Le prieur provincial a essentiellement trois tâches :

  • Promouvoir dans la Province l’esprit et la vie authentique de l’Ordre. Il stimule les frères dans leur tâche de prédication.
  • Travailler au bien commun de l’Ordre en favorisant la collaboration entre les différentes provinces, en lien avec le Maître de l’Ordre.
  • Promouvoir la coopération entre la Province et les différents diocèses dans lesquels elle se trouve ainsi qu’avec les autres familles religieuses.

Conseil provincial

Le conseil doit donner son consentement ou son avis au Prieur Provincial pour les questions que le droit de l’Ordre ou de l’Église définissent. Il se réunit sous sa présidence.
Il se compose de l’ancien prieur provincial, du Régent des études, des six définiteurs du chapitre provincial, des deux prieurs régionaux, des deux conseillers élus par le chapitre provincial et du syndic provincial.

Assistant du prieur provincial

L’assistant du provincial ou encore le « Socius du Provincial » apporte son aide au prieur provincial dans le gouvernement de la Province.

Régent des études

Le régent, sous l’autorité du prieur provincial et assisté de la commission de la vie intellectuelle dont il est le président, s’attache à promouvoir et coordonner toute la vie intellectuelle de la Province.

Définiteurs du chapitre provincial

Les définiteurs, élus par le chapitre provincial, gouvernent la Province avec le président du chapitre. Celui-ci achevé, ils participent activement aux délibérations du conseil provincial.

Prieur régional

Le prieur régional est le supérieur d’un vicariat de la Province. Toutes choses égales, son rôle est comparable à celui du prieur provincial. Il répond devant le chapitre provincial.

Syndic provincial

Le syndic, en lien avec le prieur provincial, et assisté du conseil économique, doit veiller avec soin à subvenir aux vrais et justes besoins des frères dans le cadre de la Province de sorte que toute vie privée soit absolument exclue.